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RDC – Rapport de HRW : le M23 et l’AFC instaurent un climat de terreur contre la société civile à Goma

Depuis l’offensive militaire du M23 en 2024, la situation des journalistes et des activistes à Goma et dans l’ensemble de la province du Nord-Kivu est devenue alarmante. Plus de 25 stations de radio ont cessé d’émettre en raison des attaques, des pillages et de la fuite des journalistes face aux violences. La prise de contrôle de Goma par le M23 a marqué le début d’une véritable chasse aux opposants, notamment les militants de la société civile et les professionnels des médias.

Dès le 27 janvier 2025, les combattants du M23 ont commencé à harceler et menacer ceux qu’ils considéraient comme des adversaires. Le colonel Erasto Bahati Musanga, commandant du M23 et aujourd’hui gouverneur de Goma, a personnellement contacté plusieurs activistes pour leur signifier qu’ils étaient surveillés. Certains ont été contraints de vivre dans la clandestinité, changeant constamment de lieu pour éviter d’être capturés.

Le 10 février, Ephraïm Kabasha, administrateur du territoire de Nyiragongo, a déclaré que la société civile et le Conseil Territorial de la Jeunesse étaient des « fauteurs de troubles » et devaient être éliminés de la gouvernance locale. Cette menace s’est rapidement traduite par des actes concrets : des militants ont reçu des appels anonymes menaçants, tandis que leurs domiciles étaient visités par des combattants du M23.

Arrestations et Détentions Abusives

En mars, deux leaders de la société civile, Jacques Niyonzima et David Muisha, ont été arrêtés et détenus par le M23. Niyonzima a été emmené dans un centre de détention militaire, battu et interrogé sur son travail relatif aux exactions du M23. De son côté, Muisha a été relâché après plusieurs jours de détention, mais en étant lui aussi violenté et menacé. D’autres militants, comme Didace Jimmy Butsitsi Nchimiyimana, sont toujours en détention.

Les menaces ne se limitent pas à la ville de Goma. Le maire de Kirumba, Jean-Louis Kulu Musubao, a publiquement annoncé l’interdiction de toute activité des mouvements citoyens et groupes de pression, notamment LUCHA (Lutte pour le Changement). L’AFC, bras politique du M23, justifie ces persécutions en affirmant vouloir « régler des comptes » avec ceux qui s’opposent à leur idéologie.

Fuite et Persécutions Transfrontalières

Face à ces exactions, de nombreux activistes et journalistes ont cherché à fuir vers des zones plus sûres. Toutefois, quitter Goma est devenu extrêmement difficile, notamment depuis la capture de Bukavu et la fermeture de l’aéroport. Certains ont tenté de passer par le Rwanda ou le Burundi, mais ces pays ont procédé à des arrestations arbitraires.

Le 4 février, Thomas D’Aquin Muiti Luanda et Clovis Munihire, deux militants critiques du gouvernement rwandais, ont été interpellés à Gisenyi, au Rwanda, avant d’être remis aux mains du M23. Ils ont été détenus pendant une semaine sans justification avant d’être libérés. Un autre militant, tentant de passer par le Burundi, a été arrêté à la frontière sous prétexte de détention de faux documents.

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme et plusieurs rapporteurs spéciaux de l’ONU ont exprimé leur « extrême préoccupation » concernant ces violations des droits humains. Le 5 mars, des rapports faisaient état de défenseurs des droits humains portés disparus après avoir tenté de fuir Goma.

Vers une Mobilisation Internationale ?

Les violations perpétrées par le M23 et ses alliés violent le droit humanitaire international, notamment la Quatrième Convention de Genève, qui interdit la détention arbitraire et les mauvais traitements infligés aux civils. La communauté internationale, y compris l’Union européenne et les Nations unies, doit renforcer la pression sur le Rwanda et le M23 pour qu’ils cessent ces exactions.

Alors que la population de Goma et de Bukavu continue de subir un climat de peur et d’oppression, il est crucial que des mesures concrètes soient prises pour assurer la protection des journalistes, des militants et des citoyens ordinaires qui osent encore résister face à cette vague de répression.

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