Il a fauché un meneur de la lutte contre l’apartheid, Chris Hani, de quatre balles à bout portant: la justice a décidé lundi d’accorder la liberté conditionnelle à Janusz Walus, après presque 30 ans de prison.
« Le ministère de la Justice et des services correctionnels est sommé de placer le requérant sous liberté conditionnelle », a déclaré le juge Raymond Zondo, président de la Cour constitutionnelle, plus haute juridiction du pays, lors d’une audience retransmise à la télévision.
La libération doit intervenir dans les 10 jours.
Chris Hani, leader communiste et haut dirigeant de la branche armée du Congrès national africain (ANC), 50 ans, avait été abattu dans l’allée de son garage le 10 avril 1993 par l’immigré polonais lié à l’extrême droite blanche afrikaner, Janusz Walus.
A l’époque, de délicates négociations avec le pouvoir blanc en vue des premières élections démocratiques dans le pays sont en cours. L’assassinat exacerbe les tensions raciales et provoque de violentes émeutes dans les townships d’une Afrique du Sud secouée par les derniers soubresauts du régime raciste. Dans un vibrant discours télévisé, Nelson Mandela appelle au calme.
Janusz Walus, aujourd’hui âgé de 69 ans, avait été condamné à mort mais le nouveau régime ayant aboli la peine capitale en 1994, sa peine avait été commuée en réclusion à perpétuité.
En 2016, un tribunal lui avait déjà accordé une libération anticipée. Mais cette décision, critiquée par l’ANC au pouvoir, avait été cassée l’année suivante.
Janusz Walus était éligible à la liberté conditionnelle depuis une vingtaine d’années. Ses demandes précédentes avaient systématiquement été rejetées.
Le porte-parole du ministère de la Justice, Chrispin Phiri, a déclaré à la presse devant la cour à Johannesburg que cette dernière décision de justice sera « appliquée ».
« Ce jugement est diabolique, complètement diabolique », a réagi Limpho Hani, la veuve de Chris Hani, très en colère. « Une injustice a été commise aujourd’hui », a déploré le leader du parti communiste, Solly Mapaila.
La mort de Chris Hani, au Panthéon des héros de la lutte anti-apartheid, est commémorée chaque année en Afrique du Sud. Sa famille s’est toujours opposée avec véhémence à la remise en liberté de son assassin et son complice, Clive Derby-Lewis.
Cet ancien député conservateur, qui avait fourni le pistolet, est mort en novembre 2016. Souffrant d’un cancer des poumons, il avait été remis en liberté l’année précédente pour raison de santé, après plusieurs demandes de libération infructueuses.
En 1993, en ce fatal samedi de Pâques dans une banlieue de Johannesburg, l’assassinat de Martin Thembisile « Chris » Hani, idole noire, par deux enragés blancs, avait traumatisé le pays.
Rentré d’exil trois ans plus tôt, M. Hani était déjà devenu l’un des dirigeants les plus populaires de l’ANC, l’un des rares à avoir su développer une aura et une influence de terrain, auprès des jeunes radicaux des townships notamment, à la mesure de son rôle-clef dans la clandestinité.
Quelques minutes après les coups de feu à Boksburg, un suspect était arrêté: Janusz Walus. Dans sa voiture, la police découvrait l’arme du crime et sur sa chemise, du sang de Hani. Son complice était arrêté peu après.
Avec AFP